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Synthèse des initiatives citoyennes et de la société civile sous la forme d’un
MODELE DE REFERENCE pour progresser vers la coresponsabilité pour le bien-être de tous aujourd’hui et demain
Synthèse construite à partir des résultats des réunions du projet CO-ACTE - Version disponible à la fin du projet -


La construction de cette synthèse s’appuie sur une question qui en constitue le point de départ et la ligne conductrice: Comment ancrer dans la société la coresponsabilité pour le bien-être de tous aujourd’hui et demain ? A cette question les citoyens interrogés ont répondu par un grand nombre de propositions (voir leur synthèse). Or beaucoup d'initiatives citoyennes font écho à ces propositions. Ayant été invitées à confronter leurs expériences dans quatre réunions thématiques, puis une réunion de synthèse et la 3ème Rencontre Internationale des Territoires de Coresponsabilité, il en est ressorti les éléments suivants :

Note : les sections B, C et D sont essentiellement les produits de la première et de la troisième réunion thématique, la section E de la deuxième réunion thématique, la section F et partiellement le G de la quatrième. La réunion de synthèse réalisée à Charleroi et la Rencontre finale à Braine-l’Alleud ont permis de compléter les sections G et H et la conclusion.

A- Les bases

1. L’idée de bien-être de tous aujourd’hui et demain vise à exprimer de la manière la plus directe et transparente l’intérêt général au niveau global. On y inclut non seulement le bien-être de toutes les femmes et des hommes sans exclusion ni discrimination, générations présentes et futures, mais aussi celui des écosystèmes vivants dans leur diversité et celui de la planète en général.

2. La coresponsabilité pour cet intérêt général global est son partage individuel et collectif par tous les citoyens et acteurs dans leur diversité : partage dans leurs convictions et dans leurs pratiques. Elle se traduit par une répartition concertée des fonctions et des responsabilités dans la société.

3. La coresponsabilité pour le bien-être de tous exprime ainsi le principe même de la démocratie, que ce soit dans les droits (bien-être de tous) ou dans les responsabilités individuelles et collectives. Elle repose sur une hypothèse qui se vérifie au fil des expérimentations: la coresponsabilité est la voie la plus pertinente et la plus efficiente pour parvenir au bien-être de tous (voir le Projet politique et de recherche du réseau TOGETHER).

4. L’organisation socio-économique et politique de la société dans son mode de fonctionnement actuel va à l’encontre de la coresponsabilité pour le bien-être de tous. Elle tend au contraire à reclure chaque citoyen ou acteur dans la défense de son propre intérêt. Or la coresponsabilité pour le bien-être de tous va bien au-delà de la négociation entre intérêts individuels. Cette dernière repose sur un rapport de force où la voix des plus faibles n’est pas ou est insuffisamment écoutée et prise en compte et donc c’est la raison des plus forts qui finit par l’emporter, générant des forces centrifuges et des écarts considérables dans la société et un cercle vicieux vers des comportements de défense. La coresponsabilité pour le bien-être de tous repose au contraire sur une démarche inclusive et génératrice d’équité dans son principe même.

5. En proposant aux citoyens de construire une vision partagée du bien-être de tous à partir de la parole de chacun, puis de réfléchir aux actions possibles à partir de là et de les mettre en œuvre, en concertation avec les acteurs publics et privés de leur territoire de vie, la démarche SPIRAL tente de jeter les bases de la coresponsabilité. Elle permet une certaine prise de conscience de la multi-dimensionnalité du bien-être et de l’importance des dimensions immatérielles et sociales, confirmant le rôle central de la coresponsabilité. D’autres méthodes participatives de plus en plus utilisées en Europe et dans le monde y contribuent également. Cependant ce n‘est pas pour autant qu’elles se traduisent par un véritable changement dans le positionnement de chacun. Les quelques heures passées à les mettre en œuvre et le faible nombre de citoyens qu’elles parviennent à mobiliser comptent bien peu par rapport aux sollicitations du système socio-économique et de gouvernance dans lequel nous vivons et qui nous pousse dans le sens inverse d’une défense de nos intérêts individuels privés.

6. Comment donc promouvoir la démarche de coresponsabilité pour le bien-être de tous à un niveau suffisant pour induire un « effet boule de neige » dans la société ? Des réunions thématiques du projet CO-ACTE il ressort que bien d’autres initiatives cultivent la coresponsabilité pour le bien-être de tous, même si elles l’expriment sous une forme moins explicite. On les trouve notamment dans les champs de la production et distribution de biens et services ou de la gouvernance. Chacune de ces initiatives ne parvient isolément, à produire une véritable transformation sociétale dans le sens recherché et en reste en fin de compte à un niveau d’intervention assez marginal. Mais en les exposant ensemble comme nous l’avons fait dans les réunions thématiques, elles nous invitent à réfléchir à comment, par leurs complémentarités elles pourraient, ensemble, entrainer une telle transformation.

7. L’idée centrale est qu’un effet « boule de neige » vers la coresponsabilité pour le bien-être de tous ne peut être possible qu’en valorisant les effets gagnants-gagnants de manière suffisamment évidente pour démultiplier l’intérêt pour ces démarches et entretenir le processus de transformation vers plus de coresponsabilité pour le bien-être de tous. Les initiatives présentées dans les réunions thématiques du projet CO-ACTE ont mis en évidence les possibilités existantes dans ce sens. Cependant des barrières culturelles, institutionnelles et organisationnelles ne leur permettent pas d’aller au-delà d’une dimension marginale. Mais d’autres initiatives ouvrent la voie pour dépasser de telles barrières. Nous cherchons donc dans cette synthèse à:

  1. mettre en évidence les plus-values des initiatives de coresponsabilité pour le bien-être de tous dans les rapports économiques et en quoi elles peuvent être décisives pour un autre modèle économique beaucoup plus efficient et pertinent.
  2. identifier, à partir d’autres initiatives les possibilités de lever les barrières structurelles à l’émergence d’un tel modèle
  3. dessiner sur la base d’initiatives dans les champs de la concertation et de la démocratie ce que pourrait être une société qui systématise de telles approches.

On parvient de la sorte à mettre en évidence ce qui pourrait constituer une ébauche de modèle synthétique d’une société coresponsable pour le bien-être de tous, permettant de réfléchir au-delà des limites de ce qui est considéré a priori comme utopique.

B- Ancrer la coresponsabilité pour le bien-être de tous dans les rapports économiques : vers une économie de la fonctionnalité.

8. Dans les rapports conventionnels d’achat et vente de biens et services, chacun essaie de défendre son intérêt personnel. Dans ce sens ce sont des rapports à caractère cloisonné. Cela s’exprime dans l’attention des acheteurs portée exclusivement sur le rapport qualité/prix et celle des vendeurs sur le rapport prix/coût, résultant dans la fixation des prix selon le rapport de force entre offre et demande. Les objectifs sont donc séparés et antagonistes entre fournisseurs et usagers. A cela s’ajoute le fait que les fournisseurs de biens ou services ont en général intérêt à vendre le plus possible pour augmenter leurs revenus, sans considération pour les conséquences environnementales et sociales. Donc dans ces rapports l’intérêt général tend à être absent.

9. Dans une démarche de coresponsabilité pour le bien-être de tous, fournisseurs et usagers d’un bien ou service partagent un même objectif : satisfaire un besoin essentiel pour le bien-être tout en respectant l’intérêt général, notamment sans impact négatif sur l’environnement. Nous ne sommes plus dans une logique de vente-achat mais dans celle d’assurer une fonction dans les meilleures conditions. Les initiatives réalisées selon ce principe mettent en évidence qu’au-delà des avantages sociaux et environnementaux les gains économiques que cela permet sont si élevés que ce choix s’impose par lui-même. Voir les exemples de l’économie de la fonctionnalité et de la coopération présentés lors de la première réunion thématique et les exemples des CSA/AMAP et maisons médicales présentés lors de la troisième réunion thématique.

10. La coresponsabilité pour le bien-être de tous dans les rapports économiques implique donc de raisonner non plus en termes de production de biens et services mais de fonctionnalités assurées au sein de la société. Elle implique de concevoir chaque fonction nécessaire pour assurer le bien-être de tous (alimentation, santé, habitat, éducation, culture, etc.) comme une coresponsabilité entre ceux qui en ont la charge et tous les citoyens comme bénéficiaires de cette fonction. Par exemple dans l’idéal des maisons de santé de Belgique, l’équipe médicale et les habitants raisonnent et agissent en coresponsables de la santé personnelle de chacun et de tous.

C- La mesure par le temps : un élément essentiel pour y parvenir

11. L’évaluation des biens et services par les prix maintient une opacité sur les coûts réels car les prix n’en sont que partiellement le reflet. Ils résultent du rapport entre offre et demande, excluant partiellement ou totalement les externalités sociales et environnementales. Les prix constituent ainsi une barrière structurelle à la coresponsabilité pour le bien-être de tous dans les rapports économiques. Cette barrière est d’autant plus pesante que la monnaie est aujourd’hui totalement déconnectée de toute signification concrète.

12. Différentes initiatives citoyennes cherchent à redonner du sens à la monnaie, notamment en créant des monnaies locales et/ou alternatives valorisant et encourageant les projets à plus grande plus-value sociale ou environnementale. Cependant des différents exemples existants ceux qui semblent aller le plus loin dans le sens d’une transparence dans les coûts sont les expériences basées sur l’échange par le temps : banques du temps, SELs (Systèmes d’Echanges Locaux) et accorderies. Outre cet avantage, l’organisation des échanges sur la base du temps introduit une équité de fait entre tous les citoyens, le temps n'ayant pas une valeur différente, qu’il s’agisse de celui d’un ingénieur, d’un médecin ou d’un ouvrier.

13. Les expériences de SELs et banques du temps mettent en évidence les effets leviers de cette forme d’échanges pour la coresponsabilité et le bien-être de tous: L’échange par le temps permet de sortir du rapport de force entre offre et demande sur les prix, considérant le temps non comme une monnaie d’échange mais comme un moyen de mesure comparative permettant de faire des choix judicieux. Cela apparait clairement dans les rapports à petite échelle : les personnes échangent leurs services en fonction de ce que chacun sait faire en moins de temps. Mais ce n’est pas une règle absolue : si quelqu’un a besoin de plus de temps, comme par exemple une personne handicapée ou âgée ce n’est pas pour autant qu’elle est exclue du système. L’opportunité lui est donnée de participer aux activités productives en fonction du temps dont elle a besoin, comme cela se passe dans les banques du temps. Bien souvent même la comptabilité par le temps est abandonnée dans les SELs et remplacée par une comptabilité à l’unité de service rendu, preuve que le temps est, plus qu’une monnaie d’échanges, avant tout un moyen d’estimation comparatif des couts et de comptabilité quand cela est utile.

14. L’échange par le temps est plus que le dépassement de l’opacité des prix. Il en est un véritable levier, comme le montre les expériences les plus anciennes comme celles que l’on trouve, par exemple, au Royaume Uni.

  • Tout d’abord par les relations sociales transversales et la cohésion sociale qu’elle génère dans la société, par exemple entre ceux qui disposent de temps et ceux dont les capacités de production sont trop faibles par rapport à leurs besoins. L’exemple a ainsi été donné d’une relation de solidarité entre des prisonniers et des personnes âgées, ces dernières remerciant les prisonniers pour le temps dont ils leur ont fait don, leur permettant d’avoir accès aux services dont elles avaient besoin.
  • Ensuite par le fait que le paiement par le temps permet une véritable participation citoyenne. Un des exemples les plus significatifs de ce point de vue est la proposition qui a été faite par certaines banques du temps italiennes de payer les impôts locaux en temps et non en argent. Ceci contribue à un changement profond dans les rapports entre citoyens et pouvoirs publics, puisque les citoyens deviennent eux-mêmes acteurs des services publics pendant le temps qu’ils donnent pour payer leur dû à la collectivité.
  • Plus généralement l’échange par le temps introduit la notion du temps de vie productive comme un bien commun, chacun étant responsable de son propre temps de vie pour soi-même et pour la communauté.

15. Enfin la mesure par le temps est essentielle dans les évaluations et choix de modèles de production au niveau macro-économique. Dans le contexte des sociétés développées où la productivité du travail a atteint des niveaux très élevés dans tous les secteurs et augmentera encore avec la robotisation, une réflexion doit être conduite sur les rééquilibrages nécessaires par rapport à certains secteurs qui demandent plus de temps. C’est le cas de l’artisanat, de la culture et surtout l’agriculture car celle-ci ne pourra être durable, saine et respectueuse de l’environnement que par des systèmes plus intensifs en main d’œuvre (agro-écologie, permaculture, etc.). C’est un point essentiel soulevé lors de la troisième réunion thématique.

D- La nécessité d’une déconnexion entre travail et rémunération

16. L’économie de fonctionnalité et la mesure par le temps apparaissent donc comme deux ingrédients majeurs pour promouvoir la coresponsabilité pour le bien-être de tous. Ils ne pourront cependant devenir une réalité tant que le travail est assimilé à la rémunération. La déconnexion entre travail et rémunération est en effet une condition pour que chaque individu et groupe puisse faire ses choix de vie productive non pas en fonction d’une rétribution financière mais du sens qu’il donne à son action pour lui-même, ses proches et la société en général. Ceci implique que le revenu ne soit plus conditionné par le temps de travail et le type de travail que chacun fournit mais soit un revenu universel égal pour tous. C’est l’idée du revenu universel de base du Réseau BIEN avec ses trois caractéristiques : universalité, inconditionnalité et suffisant pour vivre.

17. Ce n’est pas par hasard si le revenu de base universel revient en force dans les débats publics et politiques aujourd’hui. Il peut être de fait un levier de transformation sociétale dans un monde en besoin de mutation. Dans un système économique où le marché du travail offre de moins en moins d’emplois rémunérés stables et où les chômeurs sont de plus en plus nombreux, notamment les jeunes, déconnecter l’emploi de la rémunération en garantissant un revenu de base universel pour tous libère la créativité individuelle et collective. Cela permet l’émergence de nouvelles activités qui font sens dans la perspective du bien-vivre ensemble et ce d’autant plus facilement que les moyens d’information et d’auto-formation sont aujourd’hui à la portée de tous par les NTIC. Les expérimentations en cours du revenu universel de base sont des laboratoires particulièrement intéressants pour comprendre les conditions d’émergence de ces activités nouvelles et comment, ensemble, elles peuvent constituer des alternatives crédibles et durables.

18. La déconnexion entre travail et rémunération est aussi une réponse au mal-être au travail devenu aujourd’hui un véritable fléau de société. Dans certains pays c’est près de la moitié de la population au travail qui souffre de burnout plus ou moins avéré. Sont en cause la pression démesurée dans le travail, l’absence ou la perte de sens de l’activité, la non-reconnaissance, la dévalorisation des capacités personnelles, voire la contradiction avec ses propres convictions et pôles d’intérêt. Ceci est en général lié à des rapports hiérarchiques autoritaires limitant les possibilités de dialogue et mettant en exergue la compétition par l’évaluation systématisée des performances individuelles plutôt que le travail en équipe et la coopération. Outre la perte de sens et de motivation, cela conduit à la sous-valorisation des ressources humaines qui prend les dimensions d’un véritable gâchis du potentiel d’intelligence collective, de créativité et d’innovation à l’échelle globale. Les nouvelles tendances cherchant à rompre avec ce type de situation sont encore trop rares et ont du mal à s’étendre, tant la rémunération compensatoire est une solution de facilité pour imposer un seul mode vertical d’organisation du travail, hérité en grande partie de l’ère industrielle et du fordisme. La déconnexion entre travail et rémunération permettrait de sortir de ces cercles vicieux et d’ouvrir la voie à des rapports plus symétriques et des approches collaboratives plus valorisantes comme on le voit par exemple dans les initiatives de travail volontaire.

E- Le rôle majeur de la subsidiarité, de la démocratie et de l’éducation

19. Prises séparément, l’économie de la fonctionnalité, les échanges par le temps et la déconnexion entre travail et rémunération avec le revenu universel peuvent paraitre relever du domaine de l’utopie. Mais en faisant le lien entre ces trois idées, on comprend comment elles peuvent, par leurs complémentarités, créer les conditions d’émergence d’une économie coresponsable pour le bien-être de tous aujourd’hui et demain. :

  • Tout d’abord la déconnexion entre travail et rémunération ne signifie pas pour autant absence de responsabilité. Comme le revenu universel la responsabilité a un caractère moral universel : la responsabilité que chacun a de son temps de vie potentiellement productif pour contribuer, individuellement et collectivement, au bon fonctionnement de la société.
  • L’organisation de fonctionnalités, où des équipes ou des entreprises et institutions d’un type nouveau peuvent se mettre en place pour assurer une fonction sociétale en accord et coresponsabilité avec tous ses usagers, ouvre des opportunités pour que chacun puisse trouver sa place selon ses motivations et les formations et compétences qu’il acquière au cours de sa vie. Les équipes professionnelles qui s’organisent dans les maisons médicales de Belgique en sont un exemple pour la fonction santé. On peut en trouver ou en concevoir d’autres pour les diverses fonctionnalités nécessaires au bien-être de tous (alimentation avec les CSA/AMAP, éducation, habitat, culture, etc.).
  • Ceci implique aussi une évaluation collective des besoins et des choix dans l’attribution du temps productif globalement disponible. Certaines règles peuvent alors devenir des références morales/éthiques reconnues et acceptées par tous. Par exemple le partage des travaux physiquement les plus pénibles est une exigence morale à laquelle chacun devrait pouvoir répondre au cours de sa vie en fonction de ses possibilités aux différents âges. Même si, selon certains, la robotisation modifiera à terme cette situation, éliminant de plus en plus ce type de travail.

20. Ces formes de concertation collective peuvent prendre plus facilement pied au niveau local, dans la proximité. C’est une première raison pour laquelle le principe de subsidiarité territoriale est primordial. Il ne s’applique pas seulement aux choix et décisions (subsidiarité politique) mais aussi à l’économie (subsidiarité économique). En d’autres termes il s’agit d’assurer les différentes fonctionnalités nécessaires au bien-être de tous au plus proche des citoyens de façon à faciliter la concertation et les accords de coresponsabilité directs entre producteurs et utilisateurs et la concertation globale sur les affectations de temps de vie. L’autre raison du caractère primordial du principe de subsidiarité territoriale est la nécessité de réduire au minimum les transports et leurs coûts environnementaux. Cependant dans beaucoup de situations les économies d’échelle ou la disponibilité des ressources naturelles obligent à organiser des fonctionnalités à des niveaux territoriaux supérieurs, ce qui passe aussi par la concertation et les accords à ces niveaux. Par exemple l’entreprise Viome en Grèce s’est, lors de sa transformation en coopérative, reconvertie dans la production de bio-détergents ménagers à base d’huiles d’olive locales, suite à une concertation citoyenne au niveau d’une région et même au-delà.

21. Ces processus de concertation et d’engagements mutuels appellent à la promotion de nouvelles formes de démocratie complémentaires de la démocratie représentative conventionnelle. Le projet CO-ACTE a pu en mettre en évidence trois, toutes indispensables pour permettre l’expression de la coresponsabilité pour le bien-être de tous :

  • L’expression des attentes des citoyens en termes de bien-être de tous et de ce qu’ils souhaitent pour y parvenir par une approche de démocratie directe introspective et prospective, individuelle puis collective (démarche SPIRAL dans ses 2 premières phases, élargie à la quatrième question avec le projet CO-ACTE).
  • La démocratie collaborative qui permet de co-construire et réaliser des plans d’actions et actions pour progresser vers la coresponsabilité vers le bien-être de tous (démarche SPIRAL dans ses phases suivantes)
  • La démocratie délibérative pour tirer les enseignements sur les grandes orientations reconnues au niveau global sous formes de chartes éthiques et politiques évolutives, complémentaires de celles qui existent déjà (voir point 23 ci-après).

(Ces trois formes de démocratie sont les bases des trois volets de la feuille de route.)

22. Ces nouvelles formes de concertation et de démocratie supposent un mode de fonctionnement basé sur des règles éthiques d’écoute, de bienveillance et de compréhension mutuelle, plaçant au-dessus de tout la culture de la confiance et du dialogue. La confiance est en effet le principal facteur non seulement de bien-être mais aussi d’efficience pour parvenir au bien-être de tous. Se donner le dialogue et la confiance comme valeurs supérieures conduit à bannir toutes les formes de manipulation, de recherche de pouvoirs, de méfiance pour mettre en avant le partage, l’équité et la préoccupation du bien-être d’autrui.

23. Une telle culture passe par un processus d’apprentissage progressif des meilleures règles de vie sociale et de gouvernance à partir des pratiques de terrain. Formaliser les bases de ce processus d’apprentissage multiniveaux, depuis le niveau local jusqu’au niveau global, est une tâche essentielle pour assurer l’évolution de la société vers la coresponsabilité. C’est ce processus qui peut alimenter une démocratie délibérative pour tirer les enseignements sur les grandes orientations reconnues et les inscrire dans des chartes de référence évolutives.

24. L’apprentissage passe aussi par la transmission de ce qui a été appris et donc par l’éducation, qu’il s’agisse de l’éducation des enfants ou de celle des adultes, notamment l’éducation populaire. L’éducation n’est pas un thème qui a été spécifiquement traité dans les réunions thématiques de CO-ACTE mais qui a été toujours évoqué comme un facteur déterminant de l’évolution vers la coresponsabilité. Pour ceci elle ne peut être vue uniquement sous l’angle de l’acquisition de connaissances et doit intégrer en son sein la préparation à la vie et l’apprentissage de la construction d’un projet de vie, en interaction avec les autres.

F- La cogestion des espaces de vie et des ressources naturelles comme levier de l’apprentissage de la coresponsabilité

25. L’espace de vie et les ressources naturelles font partie de la vie de chacun au quotidien et constituent la base de réponse à des besoins essentiels (habitat, mobilité, alimentation, vie sociale et culturelle, …). Ils ont par ailleurs un caractère de biens communs dont l’amélioration et la préservation sont de la responsabilité de tous ceux qui en vivent. Ils sont donc des leviers concrets et incontournables pour l’apprentissage de la coresponsabilité. La question est de savoir comment s’organise leur gestion : S’agit-il d’une gestion cloisonnée où chacun défend son propre intérêt et quelles sont les marges de manœuvre pour une gestion partagée et collaborative ?

26. La deuxième réunion thématique, portant sur ce thème, a mis en évidence de nombreux exemples d’initiatives allant dans le sens d’une gouvernance coresponsable de l’espace et des ressources naturelles. L’espace public tout d’abord avec les diverses formes de collaboration entre autorités publiques et citoyens pour en co-dessiner l’utilisation (diagnostics en marchant, réaménagements participatifs, co-conception de l’utilisation des espaces publics et des voies d’accès comme le pistes cyclables, gestion partagée du traitement des déchets, etc.). Egalement des espaces privés avec la mise à disposition pour des activités collectives comme les jardins partagés et les formes hybrides comme les CLT (Community Land Trust) permettant une gestion souple et équitable de l’habitat.

27. Il existe également des instruments juridiques et politiques favorisant la systématisation d’une approche collaborative de l’espace et des ressources naturelle comme la Charte des Paysages du Conseil de l’Europe. Celle-ci met en avant le paysage comme un concept intégrateur de diverses dimensions (esthétique, sociale, environnementale, comme ressource pour assurer différentes fonctions, comme base de coexistence au quotidien, …) et propose un cadre de réflexion méthodologique pour une gestion partagée entre tous les acteurs concernés (vivants sur place ou utilisateurs occasionnels).

28. La gestion participative des espaces et ressources naturelles est intimement liée à la question du bien-être des générations futures. D’une part leur préservation, amélioration et transmission en est l’expression même. D’autre part le territoire et les infrastructures qu’il comporte sont la principale ressource pour opérer la reconversion aujourd’hui urgente vers les énergies renouvelables et l’abandon des énergies fossiles. Des exemples concrets, comme à Montdidier ou Loos-en-Gohelle en France démontrent la possibilité de réaliser une reconversion intégrale au niveau local en quelques années. Ceci en impliquant tous les acteurs locaux dans la valorisation de toutes les possibilités d’une gestion coresponsable de l’espace : éoliennes, utilisation des toits pour les panneaux solaires, valorisation de tous les déchets non recyclables, etc. L’expérience démontre que pour pouvoir réussir et s’inscrire dans la durée une telle reconversion doit pouvoir combiner à la fois une forte mobilisation citoyenne et des approches d’incitations ciblées (fiscales, financière, de visibilité, de sens).

G- Vers un nouveau paysage institutionnel et politique de la collaboration et la coresponsabilité.

29. Nous en arrivons maintenant à une question cruciale : De la diversité des initiatives collaboratives existantes dans tous les domaines et de leurs complémentarités ressort assez clairement ce que pourrait être une évolution de la société vers la coresponsabilité pour le bien-être de tous. Cependant une bonne articulation entre ces initiatives n’est pas suffisante en soi pour produire une telle évolution. De multiples barrières structurelles (culturelles, sociales, politiques) s’y opposent. En particulier les asymétries de pouvoirs et les inégalités sociales croissantes, voire les privilèges bien établis rendent difficile toute évolution vers des situations de partage. Ces barrières ne peuvent être dépassées qu’à deux conditions additionnelles :

  1. Introduire un processus d’apprentissage qui fasse émerger les plus-values des approches collaboratives à un niveau gagnant-gagnant suffisamment visible et convaincant pour parvenir à un point d’acceptation largement partagé et de non-retour.
  2. Avoir le temps et les moyens nécessaires d’un tel processus.

30. Commençons par la deuxième condition (la première est traitée dans la section suivante). Les initiatives collaboratives restent le plus souvent marginales ou éphémères sans pouvoir dépasser le stade de la petite échelle et s’inscrire dans la durée. Ceci faute d’avoir le temps et les moyens de faire la preuve de leurs avantages. Elles doivent donc bénéficier d’un cadre favorable pour y parvenir. Ce point a été débattu lors de la réunion portant sur le dialogue politique à Charleroi les 28, 29 et 30 septembre 2016.

31. Une première difficulté réside dans les inadéquations entre les politiques publiques et les approches collaboratives. Cela se reflète, par exemple, dans le décalage entre la temporalité des initiatives et celle des institutions, le fonctionnement administratif et par secteur des politiques publiques, les modes de financement et de contrôle basés sur les dépenses plutôt que sur les résultats recherchés et les impacts, les modes d’appel à propositions favorisant la compétition plutôt que la recherche de complémentarités et de synergies, l’insuffisance d’écoute et de prise en compte des avis des acteurs porteurs des informations adéquates dans les prises de décisions, etc. Il y a donc nécessité d’expérimenter de nouvelles formes de gouvernance qui prennent le contrepied de ces pratiques et favorisent la collaboration et la créativité. Ces expérimentations s’inscrivent dans une réflexion sur le rôle des pouvoirs publics comme garants et facilitateurs des processus collaboratifs et sur le principe de subsidiarité horizontale (principe selon lequel l’Administration favorise et privilégie l’initiative autonome des citoyens dans l’exercice d’activités d’intérêt général).

32. Au-delà de ce questionnement du rôle des pouvoirs publics, il y a la nécessité de cadres institutionnels adéquats qui créent des espaces de concertation et de codécision. La démarche SPIRAL prend en compte cette nécessité en posant la constitution d’une plateforme de concertation territoriale comme un préliminaire indispensable à toute démarche collaborative dans un territoire donné, quel qu’en soit le niveau (village, ville, microrégion, etc.). Regroupant les habitants ou leurs représentants et les acteurs publics ou privés, individuels et collectifs, cette plateforme crée le creuset du dialogue, à partir duquel un processus collaboratif ouvert et inclusif peut prendre place et se développer intégrant différents types d’initiatives de divers domaines, complémentaires les unes des autres, comme celles mises en évidence dans ce document ou d’autres relevées lors des différentes réunions thématiques. Cependant l’expérience prouve que de tels processus demandent du temps, s’étalant sur plusieurs années. Elles ne peuvent donc être des plateformes temporaires constituées à l’occasion d’un projet, mais doivent pouvoir s’inscrire dans un nouveau paysage institutionnel à long terme.

33. Certaines initiatives communautaires de l’UE comme LEADER ou certaines politiques internationales comme les agendas 21 ou les villes saines promues par l’OMS ont permis ou facilité la constitution de telles plateformes territoriales collaboratives sur plusieurs années, en en faisant même une condition. Cependant du fait de leur origine, de telles plateformes sont restées attachées à la politique qui les a promues. Même dans l’initiative communautaire LEADER ou les agendas 21 qui préconisent une démarche collaborative intersectorielle, il s’avère difficile de leur donner une légitimité qui soit reconnue par tous les interlocuteurs, conduisant à de nouvelles formes de cloisonnement.

34. La seule façon d’aller au-delà de ces limites pourrait bien être de créer des structures territoriales collaboratives ayant force de loi avec le même niveau de légitimité et de reconnaissance que les collectivités territoriales de la démocratie représentative. Elles constitueraient la base des démocraties collaborative, directe et délibérative, complémentaires de la démocratie représentative. Elles seraient ainsi les interlocuteurs légitimes uniques de tous les pouvoirs publics, permettant une véritable intégration des services et des politiques publiques avec les actions de la société civile sur la base du principe de subsidiarité horizontale. Les expériences conduites à ce niveau de formalisation sont rares. Citons celui du Cap Vert en place depuis 2003 qui grâce à une loi nationale a institué deux niveaux de plateformes territoriales collaboratives : 1) les associations d’habitants au niveau de chaque village, regroupant de facto tous les habitants, et 2) des plateformes multiacteurs au niveau de chaque microrégion (les îles dans le cas du Cap Vert), dans lesquelles sont représentées toutes les associations d’habitants du premier niveau, aux côtés des acteurs institutionnels de la microrégion : acteurs publics (municipalités, services déconcentrés de l’Etat) et privés (associations d’entreprises, ONG, etc.). Les conditions sont ainsi créées pour une collaboration intégrale entre toutes les parties de la société locale.

35. Une telle perspective présente plusieurs avantages particulièrement importants pour progresser vers la coresponsabilité pour le bien-être de tous. Outre ceux précités (collaboration intégrale s’inscrivant dans la durée) l’existence légale de telles structures permet de donner un statut de bien commun à tout bien dont elles ont la propriété, comme cela a été relevé lors de la troisième réunion thématique. En effet ces plateformes, associations d’habitants ou plateformes micro-régionales, sont des entités légales d’un type nouveau dont les membres sont définis non pas par des personnes physiques ou morales précises mais par la partie de l’humanité vivant sur le territoire de référence, toute personne quittant le territoire perdant sa qualité de membre potentiel et toute personne venant y vivre acquérant de ce fait un droit à être membre. Leur patrimoine peut donc être considéré comme une propriété de l’humanité dont la responsabilité de la bonne gestion revient à la partie de l’humanité qui vit sur ce territoire. Il y a là une notion de coresponsabilité faisant le lien entre le niveau local et global. Ceci peut être particulièrement intéressant lorsqu’il s’agit de préserver et améliorer des ressources d’intérêt général comme la biodiversité, les paysages et le patrimoine culturel. Un exemple de ce type est en discussion sur la Medina de la ville de Kairouan, patrimoine de l’humanité. Au-delà de cet avantage, la gestion collective des biens communs est un facteur d’apprentissage de la coresponsabilité particulièrement puissant car il permet de mettre en évidence rapidement la plus-value de ce type de gouvernance dans l’intérêt général (voir ci-après).

H- Promouvoir de véritables processus d’apprentissage.

36. Venons-en maintenant à la première condition d’une évolution vers la coresponsabilité pour le bien-être de tous : comment assurer un processus d’apprentissage qui fasse émerger les plus-values des approches collaboratives à un niveau gagnant-gagnant suffisamment visible et convaincant pour parvenir à un point d’acceptation largement partagé et de non-retour. La gestion des biens communs au sein de plateformes territoriales nous en donne un exemple concret. Prenons le cas de l’accès à une ressource comme la terre. Il existe des exemples anciens ou nouveaux où les terres villageoises sont gérées collectivement, intégralement ou en partie, soit au sein de coopératives soit en la redistribuant aux familles vivant de l’agriculture en fonction des besoins (voir les exemples présentés lors de la quatrième réunion thématique). La plus-value de tels systèmes est considérable à tous points de vue : meilleure équité, meilleure valorisation de la terre, facilité des modes de transmission, évitant les problèmes complexes d’héritage avec leurs lots de conflits destructeurs de la cohésion sociale au sein des familles.

37. Faisant le lien avec l’idée d’une économie de la fonctionnalité on peut concevoir une situation idéale où l’ensemble des ressources seraient gérées ainsi collectivement par des plateformes territoriales et mises à disposition des personnes individuelles ou collectives pour la fonction sociétale dont elles ont la charge. Dans le cas de la terre cela concerne pour l’essentiel la fonction alimentaire (mais pas seulement) et le concept peut être étendu à toutes autres ressources, que ce soit pour des activités productives (pêche, ateliers de transformation, réparation, etc.) ou pour des besoins finaux comme l’habitat. On retrouve ici les engagements de coresponsabilité d’une économie de la fonctionnalité entre d’une part ceux qui ont la charge de la fonction et tous ceux qui en sont usagers, pouvant être représentés par la propre plateforme territoriale.

38. Reste la question de la propriété privée qui pourrait apparaitre a priori comme un obstacle à une telle évolution. Mais comme l’a bien démontré l’atelier thématique sur la gestion des biens communs lors de la Troisième Rencontre des Territoires de Coresponsabilité à Braine l’Alleud, la contradiction n’est qu’apparente si on déconnecte propriété et usage. Et là aussi les plateformes territoriales sont un élément de clarification qui peut être décisif : un propriétaire d’un terrain ou d’un autre bien peut très bien mettre à disposition de la plateforme ce bien pour sa gestion collective pendant un temps déterminé ou indéterminé, gratuitement ou sous une juste rémunération ou le garder pour lui-même pour assurer ou non une fonction sociétale utile pour la communauté. Il y a donc une grande souplesse permettant de multiples scénarios possibles en fonction des intérêts de chacun.

39. Ceci conduit à une question majeure des processus d’apprentissage que l’on devrait même ériger en règle d’or, à savoir que rien ne peut être imposé, le droit à l’autonomie dans les choix de vie de chacun étant un droit inviolable. Certes si le revenu universel de base est introduit, il a pour contrepartie une responsabilité morale universelle. Mais il s’agit là d’une exigence morale que chacun apprend et concrétise à son niveau et son rythme, en fonction de son histoire et de ses propres découvertes et apprentissages. Cela ne veut pas dire que l’apprentissage est laissé au bon gré et vouloir de chacun. Il y a un véritable apprentissage de l’apprentissage à promouvoir au sein de la société.

40. L’apprentissage de l’apprentissage à vivre ensemble le mieux possible et sans prendre en otage les ressources de la planète et le bien-être des générations futures est véritablement le fond de la question du progrès sociétal. Or un tel apprentissage implique de mettre en avant quelques règles fondamentales :

41. La première est celle du respect du temps nécessaire. Par exemple il est probable que l’introduction du revenu universel de base se traduise dans une première phase par ce qui pourrait être considéré comme de l’opportunisme de ceux qui en profitent pour ne plus rien faire et simplement se reposer. Cependant dans un monde où la frustration est généralisée à beaucoup de couches sociales, de telles attitudes font partie du jeu nécessaire et il serait une erreur d’en conclure trop vite qu’une telle mesure est inappropriée. Peu à peu chacun trouvera la meilleure façon de dédier son temps à la société en interaction avec les autres, même si c’est probablement en commençant par ses proches. De même il serait une erreur de ne pas respecter les rythmes de chacun dans les choix qui sont faits individuellement et collectivement. Là aussi dans une société qui a mis en exergue le culte de l’individualisme, l’émergence d’autres types de comportements demandera du temps, notamment de la part de ceux qui ont le plus profité de cet état de fait. Dans cette question du temps le maitre mot est celui de la confiance, confiance dans les autres et dans l’avenir, comme une valeur supérieure à cultiver comme une référence avec le dialogue, comme déjà dit.

42. Une deuxième règle fondamentale est la préservation et la capitalisation des acquis. Quand des volontés ou des choix positifs apparaissent, l’opportunité doit leur être donnée de se réaliser pleinement évitant leur perte, laquelle est négative non seulement en soi-même mais aussi parce qu’elle peut avoir un effet de découragement et de repli sur soi encore plus irréversible. De ce point de vue les plateformes au niveau micro-local sous la forme d’associations d’habitants ou au niveau municipal ou micro-régional peuvent jouer un rôle majeur étant des lieux de concertation permanente où chacun et chaque groupe ou organisation peut se positionner dans un projet collectif en construction. Au-delà de ceci elles sont un moyen de capitaliser les acquis du bien commun. En effet beaucoup de personnes souhaitent pour diverses raisons à un moment de leur vie où en fin de vie, faire don d’une partie ou de la totalité de leurs biens à la communauté des humains. Ceci est parfois lié à certaines pratiques religieuses comme les biens arrêtés dans la culture islamique. De ce point de vue les plateformes territoriales sont un garant de respect de leur volonté, évitant les formes d’usurpation que l’on a pu voir dans le passé. Un tel processus permet d’augmenter progressivement les biens communs gérés collectivement. Ces deux exemples mettent en évidence le rôle fondamental de la préservation et capitalisation des acquis pour progresser vers la coresponsabilité pour le bien-être de tous

43. Une troisième règle est la visibilité des plus-values obtenues. C’est une question qui demande d’autant plus d’attention que les effets gagnants-gagnants doivent être bien mis en avant pour convaincre du bien-fondé des démarches de co-construction et de coresponsabilité, notamment ceux qui ont apparemment le plus à perdre de leur point de vue. Or les plus-values sont aussi bien matérielles et qu’immatérielles, ces dernières étant moins visibles et demandant un plus grand effort de mise en lumière.

  • Les plus-values matérielles sont nombreuses. Ce sont d’abord celles obtenues grâce à la coresponsabilité dans les rapports économiques (voir section 1), permettant une meilleure valorisation des ressources existantes, la réduction des gaspillages et des coûts à tous les niveaux ainsi qu’une plus grande adéquation avec les attentes et besoins des citoyens, de même que les économies qui seront générées par la confiance. La libération du potentiel humain de créativité et d’initiatives est également porteur de production de nouvelles richesses en syntonie avec les attentes des citoyens. De la même façon la plus grande équité dans l’accès aux ressources est également source de plus-values matérielles permettant leur utilisation plus rationnelle.
  • Les plus-values immatérielles concernent les gains en bien-être dans ses dimensions immatérielles comme le sens de l’action, la reconnaissance, la paix dans les rapports humains autant . Elle contribuera amplement à revoir les modes de consommation de manière plus durable.
  • Ces différentes plus-values, matérielles et immatérielles réunies, permettront d’atteindre un objectif et une plus-value essentiels à mettre en avant, à savoir la reconversion énergétique et l’abandon rapide des énergies fossiles et minières, principal facteur du changement climatique en cours et de la destruction de l’environnement.

44. La mise en évidence des plus-values obtenues n’est pas seulement nécessaire pour convaincre du bien-fondé de la coresponsabilité pour l’apprentissage du bien-vivre ensemble. Ce sont des éléments de référence essentiels pour identifier et approfondir les voies les plus pertinentes pour y parvenir et donc pour conduire le progrès lui-même. Elle demande de bien concevoir les méthodes d’évaluation et de mesure notamment des dimensions qualitatives et non directement visibles.

I- Conclusion : Le lien avec la feuille de route

45. En conclusion le modèle de référence qui ressort des initiatives citoyennes et de la société civile s’inscrit dans un processus d’apprentissage s’appuyant sur 4 hypothèses dont la démonstration est encore partielle et demande à être affinée :

  • Première hypothèse : le bien-être de tous, générations présentes et futures, tel que défini par les citoyens eux-mêmes, est un objectif non seulement souhaitable mais aussi réalisable.
  • Deuxième hypothèse : La coresponsabilité est la voie la plus pertinente et efficiente pour parvenir à cet objectif.
  • Troisième hypothèse : Beaucoup d’initiatives existantes s’inscrivent dans cette voie et c’est à partir de leurs complémentarités qu’il sera possible de la concrétiser.
  • Quatrième hypothèse : Ceci nécessite un processus d’apprentissage qui ne sera possible qu’à condition d’en disposer des moyens organisationnels et de partager certaines règles.

Le modèle de référence tel formulé dans ce document représente l’état de d’avancement dans les troisième et la quatrième hypothèses à la fin du projet CO-ACTE.

46. Pour pouvoir aller plus loin une feuille de route a été élaborée dans le cadre du projet CO-ACTE.

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