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Préliminaires

L’objectif de cette page est de présenter SPIRAL comme une démarche simple, peu couteuse en temps et génératrice d’une réelle valeur ajoutée rapidement perceptible, pour favoriser la compréhension et l'appropriation de la démarche par les acteurs collectifs.

En effet, les acteurs collectifs adopteront ce cadre méthodologique s’ils le perçoivent contributeur à l’atteinte de leurs buts. Tout comme les parties prenantes de ces acteurs collectifs, s’y impliqueront s’ils sont persuadés qu’ils peuvent en être pleinement acteurs et que le rôle qu’ils y joueront, sera « reconnu ».

Actuellement, les acteurs collectifs doivent faire face à un environnement de plus en plus mouvant. Ceci engendre une complexité intrinsèque croissante. Ils doivent être en mesure de faire évoluer de manière cohérente leur vision, stratégie et activités opérationnelles. Pour relever un tel défi, le plein engagement de l’ensemble des parties prenantes est requis.

Or, dans beaucoup d’acteurs collectifs, nous constatons une réelle césure de sens : les individus davantage mobilisés sur le « comment », ont souvent perdu de vue la raison d’être des opérations. Quant aux orientations stratégiques, elles sont souvent déconnectées des réalités opérationnelles. Ces disparités ont pour conséquence de ne pas générer de valeur à bon escient, les systèmes s’épuisent et doivent faire face à des dégâts collatéraux importants (burn out, risques psychosciaux, …).

Pour faire face à ce contexte, les acteurs collectifs nécessitent qu’une réelle transformation s’opère en leur sein. SPIRAL peut contribuer à les y accompagner, à condition de ne pas générer de contraintes supplémentaires en rajoutant du « faire », là où il y en a déjà de trop.

La proposition qui suit, s’inscrit dans une perspective de transformation progressive des acteurs collectifs par le re-questionnement de leur raison d’être et notamment leurs missions sociale et sociétale. la focalisation sur ce qui est vitale pour elles et leur écosystème l’appui sur l’intelligence collective, cad les talents qui la composent et leur capacité de collaborer pour servir le projet partagé. Partant du principe que c’est le désir à participer à cette aventure qui sera un des principaux moteurs d’action et de pérennisation dans le temps

Cadre politique

En accord avec la Stratégie et le Plan d’Action pour la Cohésion Sociale du Conseil de l’Europe, SPIRAL est une démarche de progrès vers une meilleure capacité de la société à assurer le bien-être de tous, par la responsabilité sociale partagée, ou coresponsabilité entre les différentes parties prenantes. Le développement de la coresponsabilité de tous (acteurs publics, privés, citoyens, …) pour le bien-être de tous les citoyens, générations futures incluses est donc au cœur de la démarche (voir la Charte des Responsabilités Sociales Partagées approuvée par le Conseil des Ministres du Conseil de l’Europe en janvier 2014).

La démarche SPIRAL offre un cadre méthodologique en constante évolution grâce à la participation de tous les territoires et acteurs collectifs qui l’ont expérimentée et appliquée et ont, par leur retours d’expérience, contribué à l’amélioration continue de ce cadre. En ce sens la démarche SPIRAL appartient à l’ensemble de la communauté des territoires et acteurs collectifs qui l’ont appliquée (dits Territoires de Coresponsabilité , entreprises de coresponsabilité, écoles de coresponsabilité, hôpitaux de coresponsabilité, etc.) et est à disposition de tous les autres. Elle relève donc clairement du domaine du bien commun.

Jusqu’à présent la démarche SPIRAL a été appliquée et appropriée surtout dans les territoires (aujourd’hui plus de 400 territoires de coresponsabilité répartis dans une vingtaine de pays) permettant de bien avancer dans son affinement et de faire le lien avec d’autres démarches participative comme les agenda 21, le programmes de développement locaux, sociaux, humains, les formes de concertation pour l’aménagement de l’espace, etc. Concernant les acteurs collectifs le nombre d’applications est encore faible, bien que les premières ont démarré à la même époque (2006 - 2007). Le processus de capitalisation méthodologique en est donc encore à ses débuts et le présent rapport vise à faire un point 8 ans après la première application (réalisée dans par la consultante, à l’époque stagiaire puis consultante du Conseil de l’Europe), de façon à disposer d’un cadre de travail formalisé qui puisse être retravaillé et affiné par de nouvelles applications (voir dernière partie de ce rapport).

Pour cette raison, le cadre ici présenté en est encore largement au stade d’une hypothèse qu’il reste à expérimenter. Notamment les fiches de chaque phase sont inévitablement des ébauches que de nouvelles expérimentations devront permettre d’affiner. La rédaction de ce cadre s’appuie cependant sur les acquis des applications qui ont été réalisées jusqu’à présent, notamment :

  • Application dans l’entreprise STRACEL à Strasbourg (2006 – 2008) et au Lycée Albert Schweitzer à Mulhouse (2007-2009), permettant de lancer les bases de SPIRAL dans les acteurs collectifs
  • Application dans les Associations de Développement Communautaire au Cap Vert (2008-2012), permettant d’aborder pour la première fois la question de la mission sociétale de l’acteur collectif (voir cadre conceptuel ci-après)
  • Application dans le chantier d’insertion le restaurant « les 7 pains » de Strasbourg (2009-2010), en impliquant pour la première fois non seulement les travailleurs mais également les bénéficiaires, usagers et fournisseurs dans la démarche.
  • Application dans les entreprises d’insertion (2011 – 2012) en partenariat avec le réseau européen ENSIE des entreprises d’insertion et l’inter-réseau IRIS, notamment pour la co-évaluation participative (phase C17 du cadre méthodologique)
  • Application à l’hôpital psychiatrique de Rouffach (2010-2013), permettant d’affiner les acquis en termes de construction d’indicateurs de progrès dans le bien-être et leurs utilisations (troisième cycle de SPIRAL).
  • Application au sein de la Direction de la Communication du Conseil de l’Europe (2013)

Cadre conceptuel

Spécificité des acteurs collectifs par rapport aux territoires dans les démarches de progrès sociétal : la question de la mission sociétale

Territoires et Acteurs Collectifs sont des espaces de vie, c'est-à-dire des espaces (physiques et/ou institutionnels) dans lesquels des citoyens (habitants, travailleurs, usagers, etc.) partagent une partie de leur vie. Dans une démarche de coresponsabilité pour le bien-être de tous, générations futures incluses, les citoyens concernés sont donc amenés à se poser la question de leur vie ensemble dans cet espace de vie pendant le temps où ils le partagent et de la préservation de cet espace pour l’humanité (et les êtres vivant en général), générations futures incluses. La question se pose donc en termes 1) de coresponsabilité du bien-être de tous dans cet espace de vie et 2) de coresponsabilité de préservation et développement de cet espace de vie vis-à-vis de l’humanité en général, générations présentes ou futures incluses en développant des solutions qui rendent compatibles les points 1) et 2).

Cette problématique se posera différemment suivant qu’il s’agit d’un territoire ou d’un acteur collectif :

  • S’agissant d’un territoire, la coresponsabilité pour l'espace de vie s pose en termes de préservation et enrichissement du patrimoine que représente le territoire et tous les biens et ressources qu'il abrite.
  • S’agissant d’acteurs collectifs, la coresponsabilité de l’espace de vie se pose en termes différents puisqu’il s’agit non pas d’un territoire mais d’une organisation institutionnelle qui, du point de vue de l’intérêt général, répond à certaines fonctions spécifiques (par exemple une entreprise répond à une fonction de production de certains biens ou services, une école répond à une fonction d’éducation, etc.). Plutôt que de fonction nous parlerons de mission sociétale pour signifier qu’elle s’inscrit dans l’objectif général de coresponsabilité (ou responsabilité sociale partagée) dans l’assurance du bien-être de tous, générations futures incluses. Par exemple une école communale a pour mission sociétale d’assurer l’éducation de tous les enfants de 6 à 12 ans dans sa commune, le lycée pour la tranche d’âge suivante, un hôpital la santé, etc.. Dans le cas d’un acteur collectif la coresponsabilité pour le bien-être de tous se pose donc en termes de compatibilité entre 1) le bien-être des personnes qui y partagent une partie de leur vie (travailleurs, usagers, etc.) et 2) la préservation et développement de la capacité de l’acteur collectif à répondre à sa mission sociétale.

La question de leur mission sociétale est donc au cœur de la coresponsabilité dans le cas des acteurs collectifs. Or sa définition dépasse le seul cadre de l’acteur collectif puisqu’elle se réfère à la société toute entière sur un territoire donné, voire même parfois globalement. Elle ne peut donc avoir de réponse sans une confrontation avec le reste de la société. Dans le cas des entreprises cette confrontation se fait le plus souvent suivant la loi du marché : l’entreprise produit ce que le marché (sous-entendu les consommateurs) demandent. Cependant le marché n’est pas un espace de débat et de choix collectifs mais uniquement un espace de confrontation des offres et demandes individuelles sur la base des coûts d’opportunité avec tous les travers que cela comporte : non prise en compte d’une grande partie des externalités négatives, notamment sociales et environnementales, dans les coûts, différences colossales dans les coûts d’opportunité selon les revenus des demandeurs, non prise en compte des besoins à long terme, quasi absence de flexibilité rendant presque impossibles les conversions et adaptations progressives avec des conséquences parfois désastreuses, effets pervers de l’atomisation des services, etc. Engager un débat sur la mission sociétale d’un acteur collectif ou d’un ensemble d’acteurs collectifs est donc un exercice indispensable pour pallier aux inconvénients d’un fonctionnement exclusivement sur la base du marché. Idéalement un tel débat doit pouvoir déboucher sur un engagement de coresponsabilité par rapport à la mission sociétale accordée de l’acteur collectif, notamment entre l’acteur collectif lui-même, les bénéficiaires/usagers/ consommateurs des biens et services qu’il assure dans le cadre de sa mission sociétale et éventuellement une entité représentant l’intérêt sociétal par rapport à cette mission à une échelle supérieure.

Un exemple particulièrement pertinent de ce type d’engagement est celui des maisons médicales en Belgique : celles-ci sont des associations multidisciplinaires de professionnels de santé (médecins généralistes et spécialistes, infirmières, y compris même des travailleurs sociaux) qui ont pour mission sociétale déclarée et reconnue d’assurer la santé de tous les habitants d’un quartier donné. Elles fonctionnent sur la base de contrats tripartites entre la maison de santé, chaque habitant du quartier et la mutuelle de santé (assurant la fonction de sécurité sociale en Belgique) pour le financement. Elles sont rémunérées sur une base fixe par habitant quelle que soit la quantité de services demandés. Ce mode de fonctionnement permet d’éviter les effets pervers du marché où les professionnels de santé sont payés en fonction du nombre de consultations et de médicaments vendus donc en fonction de la maladie et non de la santé.

Différences de processus entre territoires et acteurs collectifs

La différence de nature entre territoires et acteurs collectifs impliquent plusieurs différences dans la conduite du processus.

  • Tout d’abord, on vient de le voir, il y a la différence de problématique générale : dans le cas des territoires il s’agit de concilier l’objectif de bien-être de tous les habitants avec celui de préservation du territoire pour les génération s futures, tandis que dans le cas des acteurs collectifs il s’agit de concilier l’objectif de bien-être des personnes qui y partagent une partie de leur vie (travailleurs, usagers, etc.), ce que nous pouvons appeler la mission sociale de l’acteur collectif avec la préservation et développement de sa capacité à répondre à sa mission sociétale. Dans les deux cas il y a une problématique générale de conciliation entre le bien-être des personnes concernées et une coresponsabilité plus large vis-à-vis de la société en générale impliquant de prendre en considération cette dernière comme point de départ du processus (voir cadre méthodologique ci-après). Dans le cas des acteurs collectif cette problématique s’exprime donc en termes de conciliation entre ses missions sociale et sociétale, en prenant cette dernière comme point de départ.
  • Une autre différence importante concerne le nombre et l’identification des citoyens qui y sont concernés. Alors que dans un territoire ce nombre atteint facilement plusieurs milliers, dizaines de milliers, voire centaines de milliers d’habitants et qu’il n’est pas toujours certain de pouvoir les identifier un à un à un, un acteur collectif ne concerne qu’un cercle limité de personnes (celles qui y participent, soit comme travailleur, soit comme usager, client, fournisseur, etc.) parfaitement identifiables. Par conséquent contrairement aux territoires il est relativement aisé, dans le cas d’un acteur collectif, d’avoir un processus exhaustif dans le sens où toutes les personnes concernées y participent.
  • Enfin le temps de vie partagé n’est pas le même : dans le cas de territoires il s’agit souvent de la totalité ou la quasi-totalité du temps pendant la tranche de vie où chaque habitant vit sur le territoire, tandis que dans le cas d’un acteur collectif il s’agit d’un temps bien particulier (temps de travail, temps d’usage d’un service) qui correspond aux moments où les citoyens concernés vont volontairement partager cet espace pour répondre à certains de leurs besoins (travail, revenu, éducation, santé, etc.).

Cadre méthodologique

L’exemple des maisons médicales en Belgique cité ci-avant peut aider à mieux comprendre ce propos. La création d’une maison médicale passe d’abord par la constitution d’une équipe médicale et sociale pluridisciplinaire qui se prépare en interne à endosser la mission et responsabilité d’assurer la santé des habitants d’un quartier et avoir la capacité de l’assumer. Cette équipe va ensuite se positionner dans un quartier où il n’existe pas encore de maison médicale pour faire un travail de confrontation avec les habitants et acteurs du quartier et s’y intégrer comme maison médicale. On voit sur cet exemple que les accords de partenariats et contrats entre acteurs collectifs, usagers et autre(s) structure(s) ne se mettent en place qu’au cours du troisième cycle qui est dès lors le véritable cycle d’affirmation et de concrétisation de la mission sociétale de l’acteur collectif.

Cet exemple des maisons médicales en Belgique met d’ailleurs en évidence le besoin de références globales dans la définition de la mission sociétale d’un acteur collectif. Les premières maisons médicales, mises en place juste après 1968 reposaient sur une idée qui était loin d’être évidente au départ mais au fur et à mesure qu’elles ont pu se développer et faire preuve de leur efficience et pertinence, les maisons médicales sont devenues une référence qui aide grandement les nouvelles équipes à se constituer sur un concept qui est devenu clair et reconnu sur le plan institutionnel et politique, du moins en Belgique. Les processus de progrès dans les acteurs collectifs vers la coresponsabilité pour le bien-être de tous passent donc aussi par des processus plus globaux d’affirmation de missions sociétales types, d’où tout l’intérêt d’un travail en réseau d’acteurs collectifs de même nature comme cela se passe pour les maisons médicales. L’organisation de réseaux d’acteurs collectifs au sein du réseau international Together, comme cela est envisagé, par exemple, pour les hôpitaux psychiatriques répond à cette nécessité. Outre le fait de faciliter le positionnement des acteurs collectifs par rapport à des missions sociétales reconnues, cela permet un apprentissage en réseau des meilleures méthodes et outils pour y répondre (voir, dans le cas des hôpitaux psychiatriques, les apprentissages dans la confrontation entre les formes d’organisation en hôpital conventionnel en France, comme à Rouffach, et celles réalisées en Italie, comme à Trento, où suite au référendum d’abolition des hôpitaux psychiatriques dans les années 1970 d’autres formes d’organisation beaucoup plus externalisées ont été mises en place).

Il n’en reste pas moins que tant que l’organisation en réseau n’existe pas et que tout reste à faire dans la définition de la mission sociétale d’un acteur collectif, le processus est plus complexe et demande une ouverture du débat très en amont, surtout quand il s’agit de missions sociétales entrepreneuriales moins évidentes que celles qui relèvent de secteurs tels que la santé ou l’éducation. Voir par exemple les expériences récentes en Grèce de reprises d’entreprises en faillite sous forme de coopératives par les travailleurs, où ces derniers débattent entre eux et avec la société locale de leur reconversion nécessaire pour être plus en phase avec les besoins des populations présentes et le respect des générations futures.

A terme il faut pouvoir envisager un processus interréseaux d’acteurs collectifs qui puisse mettre en évidence les complémentarités entre missions sociétales d’acteurs collectifs par rapport à l’objectif de coresponsabilité pour le bien-être de tous, générations futures incluses, et donc les aider à mieux se positionner par rapport à cet objectif. C’est ici un point de convergence fondamental entre les processus SPIRAL territoriaux et ceux qui sont conduits dans les acteurs collectifs. Il passe par une réflexion démocratique globale sur les différents types de productions de biens et services qu’implique l’objectif de bien-être de tous, générations futures incluses, partant de la synthèse globale de la définition du bien-être de tous par les citoyens (dernière phase de la démarche ascendante du Plan de Cohésion Sociale du Conseil de l’Europe). Tant que cette réflexion démocratique globale n’existe pas la définition des missions sociétales doit se faire cas par cas dans une démarche ascendante, au sein d’un même territoire ou au sein d’un réseau d’acteurs collectifs.

Conclusion

L’amélioration de cette proposition ne peut se faire de manière satisfaisante qu’au travers d’un processus d’expérimentation et d’apprentissage progressif. J’espère toutefois avoir contribué à poser les premières pierres des chemins de progrès méthodologiques.


Dernière modification de la page : Mardi 28 juillet 2015 15:17:12 UTC